Rencontre avec Pauline Le Mouellic, fondatrice de Graines de Footballeuses

Peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Pauline Le Mouellic, j’ai 28 ans et j’habite en Ile de France. Je suis la fondatrice et la directrice générale de Graines de footballeuses. Je suis joueuse de football au régionale 1 au CA Paris 14.

Peux-tu nous parler de Graines de Footballeuses ?

Graines de footballeuses est un projet social, éducatif et sportif qui est né dans le 18ème arrondissement de Paris. À la base, le projet a commencé sur Instagram en mars 2020 pendant le confinement. Ce dernier a pris rapidement beaucoup d’ampleur et en quelques semaines, la page comptait plus de 1500 abonnés. En novembre 2020, l’association a été créée et les premiers événements se sont tenus, en respectant les normes sanitaires.

Aujourd’hui, nous utilisons le sport, et notamment le football, comme levier d’émancipation, d’inclusion, d’éducation et d’insertion pour les jeunes filles de 3 à 18 ans. Mais également, pour lutter contre les stéréotypes de genre, dans les clubs et en milieux scolaires. Aujourd’hui, nous avons plus de 400 bénéficiaires en région parisienne. Nous prévoyons de nous déployer en régions dans les mois et années à venir.

Citation

Pourquoi avoir créé Graines de Footballeuses ?

Pour comprendre pourquoi j’ai décidé de fonder cette association, il est nécessaire de connaître mon histoire personnelle. J’ai commencé le football en Normandie quand j’étais enfant, à l’âge de 7 ans. Je me suis toujours sentie à ma place dans mon équipe, car ce sont mes amis d’école qui m’ont permis de commencer le football en me demandant de venir assister à un tournoi. Je suis restée plusieurs années dans l’équipe de la MJC Grieu, près de Rouen, avec les garçons.

Malheureusement, j’ai arrêté à 13 ans, ne supportant plus les moqueries venant des adversaires, que je subissais lors des matchs ou dans la cour de récré à cause de ma pratique sportive. J’ai également stoppé ma pratique parce que je n’avais aucun exemple de joueuses de football de mon âge ou adulte dans mon entourage. Je ne savais même pas qu’une équipe nationale féminine jouait sous les couleurs de la France.

C'est en arrivant à Paris que je reprends sérieusement le football. C’est un nouveau monde qui s’ouvre à moi et je découvre que des filles partagent la même passion. Il m’aura fallu plus de 10 ans pour m’en rendre compte !

En discutant avec les jeunes joueuses que je coache, je me rends compte que beaucoup d’entre elles se voient arrêter au même âge que moi car, malgré leur pratique, elles ne se sentent pas tout à fait à leur place sur ce terrain et dans ce sport. Elles n’ont pas confiance et ne se sentent pas légitimes de prendre la place sur le terrain. Elles formulent les remarques suivantes “Dans la cour de récré, on ne me donne pas le ballon”, “Plus tard, je ne pourrai pas être une femme et jouer au foot”, “Si je continue le foot, je vais forcément être un garçon manqué toute ma vie”.

Très attristée par ce constat, je me questionne et me rends compte qu’il s’agit d’un sujet qui ne touche pas seulement de sport. C’est sociétal ! Une fille, une femme, doit toujours prouver, gagner sa place, se justifier. Tout au long de sa vie, elle intériorise des préjugés, des remarques, qui font qu’elle aura moins confiance.

Nous attendons souvent qu’il existe des barrières à la pratique (culturelles, financières), mais il y a une barrière qu’on ne voit pas : c’est le manque de confiance. Je décide alors de créer une association pour rendre visible la pratique féminine et accompagner les jeunes filles dans leur affirmation de joueuses et de femmes. Je suis persuadée qu’il faut intervenir auprès des jeunes filles le plus tôt possible, afin d’interrompre ou d’empêcher l’intériorisation de stéréotypes gardant les filles à l’écart du ballon rond. Je suis persuadée qu’il faut aussi les inspirer. C’est au niveau des jeunes et des très jeunes que la différence doit alors se faire.

Quelles sont les actions que vous menez ?

Nos actions s’organisent autour de 3 piliers :

  • Le baby foot 100% féminin : Séances pour les jeunes filles de 3 à 6 ans, dans le 17e, 18e, 9e, 13e afin de limiter l’intériorisation des préjugés discriminants dès le plus jeune âge. Leur montrer qu’elles ont la place sur un terrain de football et sur tous les autres terrains, surtout ceux auxquels on ne leur donne pas facilement accès.

  • Les stages « Les terrains des possibles » et la « colo des possibles » : Stages et séjour pour les filles de 9-18 ans pendant les vacances. Pratique du football et ateliers extra-sportifs visant à donner des outils d’émancipation et d’insertion aux jeunes. Au programme : échanges sur un parcours inspirant, découverte du monde de l’entreprise, premier pas en coaching et sensibilisation à une cause.

  • Les interventions en clubs et milieux scolaires : Intervenir de la classe dès l’âge de 4 ans jusqu’à l’âge de 18 ans pour informer et sensibiliser les élèves sur les discriminations de genre et l’égalité femmes-hommes dans le sport et dans la société. Le but est d’ouvrir les débats, de mettre des mots sur des comportements et de donner des bonnes pratiques en classe et sur le terrain.

Avec l’arrivée des JO, allez-vous mettre des choses en place ?

Pendant l’été des JO, nous animerons des ateliers afin de démocratiser la pratique pour les jeunes filles dès 3 ans et pour les femmes. Ces activités dispensées pendant les JO ne s'arrêteront pas à la fin de ces derniers. Nous parlons souvent d’héritage de ce grand événement, il s’agit donc d’installer ces pratiques dans la quotidien des jeunes filles et des femmes, ainsi que de rendre visible la pratique pour changer les mentalités et les comportements sur le long terme.

Vous avez remporté l’appel à projets en décembre dernier, peux-tu nous en dire plus sur l’avancée du projet ?

En décembre dernier, nous apprenions la bonne nouvelle pour l’appel à projets Energic ! Nous souhaitons organiser un séjour socio éducatif et sportif cet été, dans la continuité de nos stages de vacances. Nous partirons avec 20 jeunes filles, de 9 à 18 ans, en Auvergne. Au programme : des ateliers de prise de parole, des ateliers pour prendre confiance en soi, des interventions métiers pour pouvoir découvrir de nouveaux horizons, des découverte de paysages ruraux mais bien-sûr… du football (quasi) tous les jours ! Nous avons hâte ! Grâce à cette somme remportée, nous avons réservé le gîte ! Nous venons de lancer les inscriptions… c’est parti !

Et si on en discutait ?

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